Marché public attribué suite à un tirage au sort et obligation de motivation formelle et matérielle

Lorsque plusieurs offres sont classées ex aequo en tête du classement des offres, un tirage au sort est organisé. En cas de contestations relatives au déroulement du tirage au sort, celles-ci doivent être rencontrées dans la décision d'attribution.

Rappel des faits

Dans le cadre d’un marché public de services de transport scolaire d’élèves, les deux soumissionnaires les mieux classés ont obtenu une cote globale identique à la suite de l’appréciation de leur offre au regard des différents critères d’attribution.

Lorsque plusieurs offres sont classées ex aequo en tête du classement final des offres, l’article 87, § 2, de l’arrêté royal du 18 avril 2017 relatif à la passation des marchés publics dans les secteurs classiques et l’article 85, § 2, de l’arrêté royal du 18 juin 2017 relatif à la passation des marchés publics dans les secteurs spéciaux prévoient ce qui suit :

« Lorsque plusieurs offres régulières, considérées comme équivalentes, sont jugées économiquement les plus avantageuses, afin de les départager, le pouvoir adjudicateur invite les soumissionnaires concernés à présenter des propositions écrites de rabais ou d’amélioration de leur offre.

Si par la suite subsistent encore des offres équivalentes, le pouvoir adjudicateur procède à un tirage au sort auquel les soumissionnaires concernés sont invités.

[…] »

En l’espèce, un tirage au sort a été organisé par le pouvoir adjudicateur afin de désigner l’attributaire du marché en cause. Après un premier tirage au sort contesté par l’un des deux soumissionnaires (les papiers contenant le nom des soumissionnaires auraient dû être placés dans une boîte qui devait être secouée), un second tirage au sort a été organisé dans la foulée, lequel a, à nouveau fait l’objet de contestations (les papiers contenant le nom des soumissionnaires ont été placés dans une boîte qui n’aurait pas été suffisamment secouée et la personne chargée du tirage au sort aurait regardé dans la boîte avant de piocher un papier).

Refusant de procéder à un nouveau tirage au sort, le pouvoir adjudicateur a attribué le marché au soumissionnaire tiré au sort lors du second tirage.

Critiquant le déroulement de la séance de tirage au sort, le soumissionnaire qui n’a pas obtenu le marché – et qui avait, par deux fois, contesté le tirage au sort – a saisi le Conseil d’Etat d’un recours en suspension d’extrême urgence dirigé contre la décision d’attribution.

Décision du Conseil d’Etat

Aux termes de son arrêt n° 251.250 du 9 juillet 2021, le Conseil d’Etat a relevé que le procès-verbal de la séance de tirage au sort litigieuse ne décrit pas la manière dont cette séance s’est concrètement déroulée. A tout le moins, ce procès-verbal ne livre pas les raisons précises pour lesquelles le pouvoir adjudicateur a accepté de procéder à un second tirage au sort et il n’indique pas davantage les raisons pour lesquelles le pouvoir adjudicateur a refusé de le recommencer une seconde fois.

A l’examen du dossier administratif, le Conseil d’Etat a considéré qu’il n’était nullement établi que le pouvoir adjudicateur aurait fait toute diligence afin de clarifier cette situation et s’assurer d’être en mesure de statuer en toute connaissance de cause. Seul le résultat du dernier tirage au sort a ainsi été pris en compte malgré le fait qu’il avait été immédiatement contesté et que, selon le Conseil d’Etat, il s’agissait d’un élément essentiel pour départager les deux offres jugées équivalentes.

Au vu de ce qui précède, le Conseil d’Etat a estimé que la décision d’attribution du marché public en cause ne reposait pas sur des motifs suffisants et qu’il n’était pas établi que le pouvoir adjudicateur se soit prononcé en connaissance de cause. En outre, le Conseil d’Etat a jugé que la motivation formelle de la décision d’attribution était insuffisante puisqu’elle n’a pas permis au soumissionnaire n’ayant pas été tiré au sort de comprendre les raisons pour lesquelles ses critiques ont été rejetées.

Par voie de conséquence, le Conseil d’Etat a ordonné la suspension de l’exécution de la décision d’attribution en raison de la violation des exigences de motivation formelle, matérielle et de prudence.

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